Contrainte: écrire quatre cartes postales, envoyées de la Chaux-d’Abel (le lieu de l’atelier littéraire), réparties sur une année; sablier: 1h.
1er Juin
Chère grand-maman,
Je t’écris de la Chaux-d’Abel, où je participe à un atelier littéraire. L’endroit est magnifique, toute cette verdure chatoyante te plairait, tu ferais de longues promenades.
Ce cadre est censé favoriser l’inspiration. A mon avis, ce qui compte, c’est surtout l’émulation entre nous et les outils que nous donnent les professeurs. Je leur ai soumis mon manuscrit, j’espère que leurs commentaires m’aideront à l’améliorer pour ensuite le publier.
Je t’envoie une gentiane en pensées,
Sonia
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2 Octobre
Chère grand-maman,
Nous nous sommes retrouvés à la Chaux-d’Abel avec les participants de la dernière fois, sans les professeurs. Nous passons le week-end à travailler sur nos textes respectifs, et nous nous lisons des extraits. Les camarades donnent leurs impressions et proposent des idées. C’est merveilleux d’établir ce contact avec des pairs et d’y trouver une solidarité. Vivement le jour où nous serons tous publiés !
La température a chuté, mais si tu voyais les couchers de soleil, féeriques.
J’espère que ta hanche se rétablira vite, quelle vilaine chute. Je t’embrasse,
Sonia
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3 Février
Chère grand-maman,
Je suis revenue seule à la Chaux d’Abel. Les contacts avec mes camarades se sont espacés puis ont totalement disparu. J’ai cru que je travaillerais mieux ici (mon manuscrit n’a toujours pas trouvé d’éditeur), mais c’était une mauvaise idée. Je ré-écris sans fin, je trouve mon texte toujours moins bon. L’hôtel est lugubre dans ses craquements, il fait nuit tôt et la neige fondante a répandu de la boue partout. L’atelier me semble si loin et je me demande bien ce que j’ai espéré de ces rencontres.
Je viendrai te voir à l’hôpital très bientôt, tiens bon, tu es forte.
Sonia
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4 Juin
Chère grand-maman,
C’est idiot de t’écrire. J’ignore pourquoi je le fais. A mon retour, j’irai relever ton courrier et je subtiliserai cette carte postale. Je viendrai te la lire, aux Aiguilles de Baulmes, là où on a répandu tes cendres.
Je suis revenue à la Chaux-d’Abel sans mon ordinateur, juste un carnet et un sac de romans. Maintenant que j’ai signé avec un éditeur, je peux m’accorder de lire, simplement, sans me torturer. Je reprends vie, après ce si long hiver. J’aurais tant voulu que tu puisses voir ça, notre nom de famille imprimé sur la couverture.
Mes camarades de l’atelier, contre toute attente, je les ai retrouvés. Ils ont tous ramé, cet hiver. Mais on a déjà deux vernissages agendés, on y sera tous. Ca démarre pour de bon.
Ta petite-fille, qui n’oubliera jamais toutes les histoires que tu lui as lues.
Sonia
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